Noël zombie à l’EHPAD

Métro

On a va finir par croire que je fais exprès, mais même pas.

La malédiction de Noël a encore frappé. (Archives : malédiction 2017, malédiction 2018, malédiction 2019, malédiction 2020). Cette année, les astres sont alignés, toute la famille se réunit chez mes parents, ce qui arrive assez rarement : les Toufaits débarquent de Tunisie, ma sœur de Finlande, mon frère de Tours. Les cadeaux sont prêts, le foie gras (pour 28 personnes) est acheté, les bagages sont bouclés, tout le monde embarque dans Titine pour le grand départ. Je suis juste allée faire un dernier test antigénique avant de partir – je suis cas contact depuis une semaine – histoire d’avoir la conscience tranquille. Au moment précis où Axel démarre, je reçois le SMS rouge fluo du SIDEP (la gestapo du Covid) : je suis POSITIVE.

Nous restons muets de consternation pendant une bonne dizaine de minutes, tous les 6 dans la voiture, nos manteaux sur les genoux mais pas le choix, on annule tout. Nous  déchargeons les bagages, le foie gras, les cadeaux, les manteaux, les gosses et nous remontons à l’appartement dont le fridge et les poubelles ont été soigneusement vidés par nous il y a une heure, les volets fermés, les draps enlevés.

Nous n’avons désormais qu’un seul objectif : la négativité du test PCR qui permettra aux Toufaits de reprendre leur avion pour Tunis dans quelques jours. Commence alors un challenge zombie très esprit de Noël (et le zombie, c’est moi). Nous sommes abonnés à Netflix, OCS, Disney+ et Amazon prime. Pour occuper les enfants, nous leur demandons de choisir un film : ils entament une dispute de 2 heures à chaque fois, toujours ça de gagné, nous nous enfermons dans notre chambre avec un bouquin en attendant.

Ils ont finalement choisi dernier train pour busan un très bon film de zombies coréens qui se déroule dans un TGV qui n’arrivera jamais à destination et où tout le monde meurt à la fin. Ou quasiment. À cause d’une seule fille contaminée. Message. Culpabilité. Tristesse sous mon FFP2.

Mais les Toufaits, eux, ne se laissent pas abattre et reprennent leurs bonnes habitudes de confinement, ce sont d’excellents pâtissiers, très créatifs. Pour rester dans la coréenne-attitude, ils confectionnent de superbes sablés de Noël squid game.

… même celui avec le parapluie. Photo avant cuisson.

Pauline réalise  également un gâteau à la banane, énorme, magnifique, tout gonflé comme un soufflé. Axel lui demande combien de sachets de levure elle a utilisé, pour rire. Elle en a mis 4. Comment ça, 4 ? Ben oui,  y’avait marqué 3/4 donc il fallait choisir entre 3 ou 4, j’en ai mis 4, nous dit-elle. Pareil pour l’huile, y’avait marqué 3/4 pot d’huile, alors j’en ai mis 4, je me suis dit que le gâteau serait plus moelleux. Ça pour être moelleux, il est moelleux, on s’en sert d’oreiller ergonomique, depuis.

Nous mangeons du foie gras à tous les repas mais je m’en fiche, je n’ai plus de goût ni d’odorat. La sécurité sociale m’appelle en personne pour me condamner à 10 jours fermes sans sortir de chez moi. Je dois aussi balancer mes cas contacts. JAMAIS ! Je suis pourtant allée postillonner chez de très chers amis l’avant-veille, au-dessus d’un Trivial pursuit que je n’ai même pas gagné. Je les préviens que la SIDEP les cherche. Ils se confinent à leur tour en me remerciant pour cet excellent prétexte qui les dispense de réveillon familial.

Omicron prend possession de mon corps, une fatigue extrême m’assaille. Je perds conscience quelques jours et je me réveille attachée à mon lit, surveillée par un adolescent moustachu et mutique qui grommelle une langue inconnue sous son masque.

Le père de ma fille vient en renfort exfiltrer son bébé d’amour loin de ce bouge infecté et nous livre un sac de provisions non périssables. Mes voisins, de généreux soignants à l’hôpital, nous déposent un nouveau lot de masques FFP2 en cadeau dans la boîte à lettres.

Le jour tant redouté arrive enfin : le test PCR des enfants. Il est négatif, gros soulagement. Ils reprennent l’avion après avoir passé une semaine de leur meilleure vie à la maison, allongés devant un écran avec de la nourriture à portée de main. Il a malheureusement aussi fallu tester Rose pour qu’elle soit autorisée à retourner dans son IME, ultime moment zombie.

illustration guernika 2.0

Le 31 décembre, je me suis endormie à 22h et pouf, 2022 est arrivé. J’ai reçu les bons vœux de mon fournisseur de couches pour adultes, de ma mutuelle, de COVIDOM (le suivi de mon virus à domicile) et de l’URSSAF. Olivier Véran a changé les règles de confinement pile le jour où le mien s’est terminé.

Bref, passons. J’ai survécu, et je n’ai contaminé personne, finalement. En revanche, chez mes parents, ils ont tous attrapé la gastro de mes nièces,  importée de leur crèche en Finlande.
Quelques mois après, trop frustrés de ne pas avoir vu la famille, nous programmons un grand week-end de rattrapage à Helsinki, où ma sœur, mon beauf et mes nièces nous attendent de pied ferme pour d’émouvantes retrouvailles.

Le départ est prévu pour après-demain.

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22 réflexions sur “Noël zombie à l’EHPAD

  1. Content de lire que finalement « tout se termine bien » après avoir été un de tes cas contact. Je viens de finir la lecture de tes deux tomes de « Metro Boulot Gogo ». Quel régal chaque soir de m’offrir ces éclats de rire réparateurs. Merci de nous régaler avec tes textes. Je t’embrasse en te souhaitant une très bonne année 2022, pleine de ces moments merdiques que tu sais si bien tourner en dérision. Merci.

    1. La culpabilité m’a retenue de te mentionner dans cette cavalcade mais je suis heureuse que tu sois en bonne santé !

  2. Génial (mais désolé pour vous tous), et le Picasso by Zoé est absolument fantastique.
    Une légère déception de ne pas avoir la photo du gateau à la banane.

    1. J’ai longuement hésité mais les sablés squid Game ont emporté la mise. Je le poste sur Facebook.

  3. Toute la famille réunie, les Tunisiens, les Finlandais, c’était quand même une super occasion… Moi, j’aurais été une fontaine intarissable. Ne pas voir ma sœur, mes nièces, renvoyer les Toufaits en Tunisie, c’est un crève-cœur ! Mais y a du Positif là-dedans, c’est le « gâteau-soufflé » de Pauline !!! Les convives ont dû faire Waouhhh en le voyant ! Merci Pauline et aussi à toi Zoé qui prend toujours la distance nécessaire pour ne pas sombrer ! Quelle force de caractère !

  4. Chère Zoé que je ne connais mais qui est la cousine de ma Béné adorée.
    Je me pose aussi pas mal de questions quant à l’aspect du gâteau de Pauline. Serait-il possible d’en voir ne serait-ce qu’un croquis ? J’avoue que j’imagine mal comment il peut tenir debout avec 4 litres d huile même si il y a 4 sachets de levure. Si tu as deux minutes, une petite maquette me soulagerait énormément. Et sinon sache que je ris je ris je ris à chacun de tes posts. Life is a bitch 😉

    1. Je ne t’en veux pas, virus Ojoannon. Nous avons passé une très bonne soirée malgré cette contamination ! Gros bisous

  5. … j’avais envie de te dire : écris un bouquin !!!! Ah ben non, c’est déjà fait… Et ton Picasso-Zoé est dingue !!!! bisettes

  6. Guernicovid renvoie Picasso à sa chères études, et, créant une nouvelle école, plonge les racines de l’art dans le compost de l’actualité immédiate.
    C’est du lourd

  7. Merci Zoé pour ce magnifique récit, je viens te souhaiter le meilleur pour cette nouvelle année. Qu’elle t’apporte tout ce que tu désires et surtout continue de nous écrire de beaux textes, c’est un régal.

  8. Chienne de vie ! Heureusement qu’il reste l’humour pour supporter tout ça. Et, soyons honnêtes, ce n’est quand même pas tous les jours comme ça…
    En tout cas, bonne, et si possible joyeuse (là j’y vais fort…) nouvelle année à toi, aux tiennes et aux tiens !
    Pascal

  9. Désolée pour le confinement, mais une bon moment de lecture en vous imaginant tous. Bonne année 2022 et vive la vie.

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