Le sport

Métro

Vous êtes tous au ski, là, mais je m’en tape !

Car le ski est un sport, sous son déguisement immaculé de CSP+. Et moi, je hais le sport.

Comme nous ne sommes pas sur Twitter ici, je vais tenter d’exposer mon point de vue de façon cohérente et le justifier à l’aide d’arguments choisis.

D’abord, il convient de différencier le sport que l’on regarde du sport que l’on pratique. Des amis m’ont déjà – à maintes reprises – expliqué le remuement de tripes nationaliste qu’un bon patriote se doit de ressentir en voyant « son » équipe se foutre sur la gueule avec le pays d’à côté. Mais je refuse d’être représentée à l’échelle mondiale par des adolescents à gourmette, analphabètes et surpayés, qui se roulent par terre dans un maillot moche en lycra mouillé. (La pire émanation du sport-spectacle étant la mode des paris en ligne et ses campagnes de pub nauséabondes du style « but en or, montre en platine / Gros gain, gros respect » que j’ai dû me faire expliquer par les Toufaits et qui porte la beaufitude à des sommets que j’espérais pourtant ne pas voir de mon vivant). Même Rose est rentrée l’autre jour de l’IME avec la photo dédicacée d’un joueur de foot quelconque venu passer du temps avec les ados handicapés. C’est très sympa de sa part, mais je ne vais pas garder ça chez moi, je l’ai jetée.

Quant à la pratique physique d’un sport, ma détestation tire son origine du collège, puis du lycée, où des profs moustachus et lubriques nous faisaient écarter les jambes au bord de la piscine sous prétexte d’échauffement. Ces vieux schnocks nous obligeaient à courir sur les pistes défoncées de vieux stades gelés, en fumant des clopes, les mains dans les poches de leur survêtement dégueulasse. C’était le lieu de la revanche sociale. Les cancres de la classe, rien dans le crâne et tout dans les muscles, se métamorphosaient quelques heures par semaine en chefs de gang pour constituer leurs équipes de sport collectif à ballons qui puent.

Ces vicelards de profs de sport laissaient leurs chouchous choisir leurs coéquipiers à tour de rôle et à voix haute. Le marché aux esclaves. Je restais toujours la dernière, personne ne voulait de moi, évidemment, et les deux brutes tentaient de me négocier comme de la viande avariée « Vazy prends-la, moi je l’ai déjà eue la semaine dernière » « hé oh j’ai pas envie de perdre le match avant d’avoir joué, t’es gentil toi ! ». Le prof était obligé de me tirer à pile ou face pour m’attribuer au perdant.

Je ne sais pas courir, je ne sais pas sauter, je ne sais même pas tendre la jambe et j’ai encore, à la plage, la hantise du ballon qu’on prend en pleine poire sans l’avoir vu arriver. C’est pour ça que les Olympiades ne sont pas vraiment ma tasse de thé (souvenez-vous des épisodes désastreux de la fête des gogos et de tablette or not tablette).

Les adultes sont lobotomisés par le sport. A 45 ans, nous avons tous dû – plus ou moins – renoncer à l’alcool, aux cigarettes et au sexe comme je l’ai évoqué dans rides et poireaux, cet article insoutenable que même mes amis les plus endurcis refusent de relire. Pour compenser, certains se sont mis au sport, espérant retrouver les endorphines envolées de notre jeunesse. Un massacre. Je ne compte plus les ligaments, les genoux, les chevilles, les vertèbres et les poignets sacrifiés, détruits, inutilisables de tous ces inconscients, esprits faibles accros à cette drogue dure et avilissante. Ils suent, lamentables et ridicules sur leur paddle, leur VTT, leur kitesurf, leurs skis, vêtus d’atroces nippes fluorescentes aux matières synthétiques fabriquées en Chine.

Mais un jour, trahissant ma routine-beauté la plus efficace (ne pas se regarder dans une glace), j’ai eu le malheur de mater mon cul dans un miroir en pied qui trainait dans ma chambre. Le choc. Capitons, peau d’orange, varices et bourrelets s’étaient donnés rendez-vous sur mon pauvre derrière flasque et blanc. Enfer et damnation, j’ai réuni mon cercle d’amies proches pour un conseil de guerre extraordinaire. Arborant toutes de concert un petit fessier bien ferme et mortes de rire, elles m’ont intimé l’ordre … de me mettre au sport.

J’ai exhumé un vieux legging acheté pour une soirée à thème (années 80) et je me suis inscrite au pilates.

Tous les mardis matin, pour une somme démentielle en plus, je m’allonge sur un matelas de camping dans la salle sans fenêtre d’un « studio » près de mon bureau et je lève les jambes pour faire des exercices tous plus ridicules les uns que les autres avec des pouffiasses hyper souples qui ont 25 ans de danse classique au compteur. La prof, consternée mais très pro, m’encourage régulièrement à grands coups de « ouiiiiiiiiii, Zoé, c’est beaucoup mieux, ça ! »  après six mois passés à répéter le même mouvement (une putain de roulade comme au bon vieux temps). Il y a des machines bizarres avec des ressorts et des cordes dans la pièce d’à côté, j’ai peur. C’est une secte. Mais je m’accroche, à 96 ans j’aurais un cul en béton.

Enfin si je survis aux représailles des Toufaits qui ont failli me tuer quand j’ai réussi à me souvenir du nom du footballeur dont j’ai jeté la photo dédicacée (Mbappé).

illustration pilates

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24 réflexions sur “Le sport

  1. Je compatis et j’approuve : ici (Arcachon) je vois passer devant la maison des malheureux qui font du jogging en transpirant même en pleine chaleur l’été, effectivement habillés de manière ridicule …
    Quant au ballon c’est ma hantise depuis longtemps, à la plage s’il y en a un il est pour moi ! Et comme j’ai des lunettes ça retentit direct sur le nez et ça fait mal..
    Je hais le ski , je déteste le foot, mais que c’est bien de respirer dans le jardin posée, avec un bouquin et de regarder les oiseaux ( quand Elisabeth est à la MAS évidemment). Toute ma sympathie ! Juliette

  2. Zoé,
    Excellent sujet bien traité.
    J’ai aussi une haine du sport collectif depuis que, avant toute croissance, personne ne me voulait dans son équipe de foot et autres sports de balles à la con. Quand j’étais assigné à une équipe, on me donnait en riant le poste d’arrière goal …
    Depuis, je ne pratique que des sports individuels à forte adrénaline (enduro, ski, kayak, parapente…) avec les succès que tu connais (pas mal de séjours à l’hôpital).
    Bises

  3. Effectivement perspicace comme d’habitude … mais pas que toi mais aussi ceux qui t’entourent: 1/ Suis d’accord avec « Favre » ; ) — 2/ Suis d’accord avec les Toufaits (Mbappé – quand même!!) — 3/ Suis d’accord avec les amis qu’il ne faut jamais relire l’article rides et poireaux …

  4. Le foot est un sport dont même les supporters comprennent la règle, c’est dire !!!
    Au moins, le rugby est un sport plus subtil puisque même les arbitres ne comprennent pas toujours la règle, au point qu’ils se font aider par des caméras.

  5. Je n’ai jamais compris l’intérêt de courir alors que l’on n’est pas pressé et que l’on souhaite profiter d’un moment tranquille sans enfants. Mais j’ai aussi ma routine beauté-détente. Je dépose mes enfants à leur cours de sport et pendant ce temps, je vais me manger un petit tiramisu et boire un bon expresso au petit restau italien à côté.

  6. Excellent ! J’en ai profité pour relire « la fête des gogo » et je m’en marre encore, surtout de votre tête quand vous avez entendu que vous étiez chef d’équipe. J’ai commencé la danse classique à 47 ans, ne désespérez de rien !

  7. J’ai besoin de courir, ça me permet de ne pas réduire Valentine en chair à pâté… Mais avant elle, je ne voyais pas quel plaisir on pouvait y trouver … Comme quoi, on profite de plein de nouveaux trucs grâce à nos gogos ! Et d’ailleurs, en y pensant, je me dis que ma toutefaite (ça s’accorde ?) de bientôt 19 ans, je la réduirais peut-être en chair à pâté aussi, sinon …

  8. Si tu y arrives je devrais pouvoir…
    J’ai le même vécu que toi pour le sport au collège et au lycée… Et le ballon qui passe est toujours pour ma pomme (et je surveille au moins une fois par jour cette foutue récré!!! ».

  9. Oh, Zoë, ma jolie nièce, toi, très classe depuis ta naissance, comment peux tu dire cela de toi ?
    Je conteste !
    Je vais essayer ta routine beauté .
    jusqu’à présent, je me disais chaque matin :Bah, j’ai été pire .
    Ca marche aussi .
    Je t’embrasse, comme je t’aime
    Odile 81

  10. Je ne savais pas que tu détestais le sport à ce point ?! Alors je t’invite à nous rejoindre au cours de yoga du mercredi, 12h45 ! Il y a Cathy et Pom, tu te sentirais moins seule ? Mais Pom n’est pas en legging malheureusement…
    Bon, j’ai qd même relu rides et poireaux, trash mais si drôle 🙂
    Bises

  11. Il peut effectivement paraître étonnant de voir 22 personnes courir derrière un ballon dans un stade, scrutés par 20.000 personnes qui, eux, auraient besoin d’exercice physique.
    On peut se demander pourquoi se faire violence avec du sport.
    On accepte bien cela avec le mariage, la vie de couple.
    Malgré la multitude de déceptions, on continue de voter…
    Au moins, le sport permet des moments de bonheur : retirer ses chaussures après un semi-marathon, d’avoir un câlin collectif quand on a marqué un but, d’avoir une pause questions connes pendant les longues minutes où on va courir.
    Pas de « chéri, tu pourrais… », ou «  papa, il me faut… ».
    C’est également le rare moment où les bien-pensants, les cols-Claudine ont disparu, ce qui te permet toute vulgarité, tous les humours gratuits. Une bouffée d’oxygène…

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